La playlist VIP par Matmatah

Matmatah

Alors que leur sixième album, double album « Miscellanées Bissextiles » est sorti l’année dernière, le groupe Matmatah est sur la route pour leur 30 ans de carrière sur toutes les scènes de France.
Je les ai rencontré au Printemps de Bourges pour échanger avec eux sur leurs influences musicales. Eric Digaire, bassiste et Léo Riou, guitariste, nous livrent leur playlist.

La playlist VIP :

  • Léo : « How Dare You Want More » – Bleachers : C’est une chanson d’un groupe américain qui est porté par Jack Antonoff. Je fais une fixette sur ce mec depuis un an je sais pas pourquoi je crois que je suis amoureux de lui. C’est un producteur qui produit plein de trucs. Il produit aussi un truc très connu comme Taylor Swift ou Lana Del Rey, comme il produit plein de petits groupes new-yorkais. C’est lui qui a récupéré le studio Electric Lady à New York qui est le studio de Hendrix. Et son groupe, Bleachers, c’est un mélange de cuivre et de musique hyper organique, hyper acoustique, c’est la fête et en même temps c’est hyper produit. J’aime beaucoup, je me suis dit que c’était bien.
  • Eric : « Highway Patrolman » – Bruce Springsteen : Quand on commence à faire de la musique et à gratouiller un peu dans sa chambre on se dit, c’est des maquettes et quand j’ai eu l’occasion de découvrir l’album Nebraska de Springsteen et notamment cette chanson, je me suis dit mais le mec il est lui aussi tout seul dans une pièce avec son quatre pistes et sa guitare acoustique sauf que ça fait une oeuvre finie et c’est une oeuvre majeure. Donc à chaque fois qu’on me pose la question si vous devez partir sur une île déserte avec un album, c’est cet album là que je choisirais. Il a tout fait tout seul, il fait un peu de tambourin, un peu de guitare… Et il raconte des histoires, et cette chanson là, à chaque fois que les premiers accords commencent, je ressens vraiment organiquement un truc très très étonnant. Et quand on fait de la musique, on rêve de créer cette sensation. C’est les gens qui vont écouter ce qu’on fait. C’est une référence majeure pour moi.
  • Léo : « Hinata (live session) » – Tif : C’est un rappeur algérien que j’adore et qui a sorti son premier EP, enfin pas son premier EP mais son premier EP qui a fait du bruit cette année. Après cet EP il a fait une live session dans une villa dans le sud de la France avec ses potes, sa famille, il y a tout le monde, les oncles, … Et ils jouent tous. C’est hyper acoustique, et lui il est au milieu de ça et il rappe. C’est un mélange de musique algérienne, de trap et de musique hyper produite aussi. ça m’a énormément touché. J’adore ! c’est cool d’avoir des chansons auto-tunés avec de la guitare aussi.
  • Eric : « Letter to Hermione » – David Bowie : Quand on commence à faire de la musique, souvent ça peut être une mélodie qui arrive ou un bout de texte ou un bout de grille d’accord. Et quand on écoute cette chanson, on se dit mais le sens de la mélodie. C’est à dire que les mots, il en a mis, mais il les fait chanter, ça parle dans tous les sens. Et quand on est musicien, on se dit mais quel chemin il trouve pour arriver à cette excellence là, à ce jeu en fait. Et donc ça fait partie pour moi des
    exercices qui devraient être obligés quand on commence à faire de la musique, c’est d’écouter des mélodistes. Parce qu’on pose pas sur une guitare sa ligne de voix il la fredonne dans sa tête et il joue dans sa tête. J’adorerais avoir eu l’occasion de passer des vacances dans la tête de David Bowie parce que ça doit être magnifique plein de produits magnifiques. J’ai une BD qui s’appelait Philémon qui est vraiment barré aussi. Je suis tombé dedans quand j’avais 11 ans, c’était des personnages. Il y en a une avec des souffleurs, les cages de souffleurs au théâtre. Le mec était en dessous à souffler les pièces. Et il en a fait des personnages. C’est ça, le personnage. C’est plein de couleurs. Finalement, il a un âne. Il discute avec son âne tout le temps. Donc, j’aime bien tous ces univers complètement barrés que ce soit aidé ou pas aidé. En tout cas c’est pour moi un des plus grand mélodiste qu’on ait jamais eu.
  • Léo : « Panic!!! » – Paris Texas : C’est un jeune groupe de rap punk américain qui mélange les guitares, les sons hyper rock avec le rap actuel et plus la prod en studio. Ils bossent avec des producteurs en duo qui s’appellent Take a daytrip qui ont fait les albums de Lil Nas X. Ils ont sorti leur premier album là et le single s’appelle « Panic!!! ». C’est un peu un mélange. On a l’impression d’entendre les Beastie Boys et Idols qui ont fait un album ensemble. C’est vraiment génial. Il faut écouter ça. En France, on n’en a pas beaucoup entendu parler alors qu’aux Etats-Unis, ils ont été adoubés par Kanye West, par tous les gros, même Rick Rubin, et on n’en a pas beaucoup entendu parler.
  • Eric : « Une de plus » – Cancre : Quand on écrit un texte, l’important c’est que les auditeurs croient à ce qu’il est raconté, l’intensité de ce qui est vécu ou ce qu’il est raconté. Et j’ai eu la chance de travailler avec un groupe qui s’appelle Cancre, pour lequel j’ai travaillé sur leur premier album. Robin Milasso, le chanteur, il a cette faculté de pouvoir chantonner tout et n’importe quoi, mais on a envie de l’écouter jusqu’à la fin de cette chanson. Il y en a eu plein en France. Quelqu’un comme Bashung, c’est pareil, il n’y a que lui qui peut dire « Dynamiteur d’aqueduc au fond des criques » et puis tout le monde se dit « Oh là là, c’est trop beau, je m’y vois trop ». Sur ce premier album, « Toutes ces phases », j’ai collaboré avec eux sur cette chanson et j’ai fait le texte et Robin l’a chanté. Et il a donné une dimension et c’est la première fois finalement que j’ai proposé quelque chose comme ça et puis d’un seul coup ça prend une couleur, ça prend un envol différent. Notre groupe et ce groupe là, il y a une espèce de relation un petit peu charnelle, un peu amoureuse parce qu’il y a un côté très organique, très animal dans ce qu’ils font et très à fleur de peau. Et Robin il a ça, quand il chante quelque chose, il capte tout de suite l’attention et ça fait partie des choses qui sont espérées et attendues par tout musicien quand on crée quoi que ce soit. Dès qu’il commence à chanter, il y a un silence qui se fait parce qu’il prend la parole, il raconte quelque chose et il emmène les gens dans son discours, dans cette histoire-là. C’est la force et aussi l’aprêté du chant en français. Il faut raconter quelque chose ou il faut capter l’attention. Donc voilà, c’était une de mes plus belles expériences de studio que d’un seul coup de dire « Tiens, essaye de chanter ça, ça pourrait être marrant » et puis au bout de deux secondes, je commençais à avoir la chair de poule en me disant « Mais en fait, t’es chiant, je pourrais te filer un ticket de course, tu le chanterais, j’aurais envie de t’écouter jusqu’au bout pour savoir le prix. » Il a cette force là et rares sont ceux qui l’ont, donc c’était un plaisir de travailler avec eux et de continuer à les suivre.
  • Léo : « I’m a ram » – Big Sugar : Je voulais parler d’un groupe qui s’appelle Big Sugar, qui était un groupe de blues rock canadien dans les années 90, qui a inspiré énormément de groupes comme les Black Keys ou plein de cette veine là. Et des groupes comme Rival Sun, qui se sont imprégnés vachement de leur musique à l’époque. Et le chanteur de ce groupe, Gordy Johnson, est décédé il y a trois quatre jours là et ça m’a fait réécouter tous leurs albums que j’écoutais quand j’étais petit et c’est vrai que c’est monstrueux ils avaient déjà ce truc, ce son qui a cartonné 15 ans après. Ils avaient déjà tout compris et pourtant c’est resté très niché.
  • Eric : « Gimme Shelter » – The Rolling Stones : Pour finir sur tous les aspects des chansons et comment elles peuvent donner envie. Quand on commence à jouer en groupe, c’est quelque chose qui devrait être dans l’apprentissage. Jouer ce titre là et comprendre cette espèce de transe qu’ils arrivent à emmener. Il y a un groove, c’est juste magnifique à écouter et à jouer. Ça donne tellement de clés sur la cohésion d’un groupe, sur la mécanique d’une chanson quand on la joue ensemble et sur le côté vraiment unidirectionnel de tout le monde. C’est-à-dire que chacun a son truc à faire mais on marche tous sur le même chemin et on voyage ensemble. Cette chanson là, on s’est fait des heures et des heures et des heures d’écoute de ça en disant que c’est le plus grand groupe de la terre. Et c’est la chanson du plus grand groupe de la terre.

Le clip « SKLOGW II (On n’a pas l’cul sorti des ronces) » :

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